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Au Fil de Synema 8 ~ Des Marionnettes, des Ficelles et la dextérité d'Henry Selick ! (2/4)

Dernière mise à jour : 31 juil. 2023


Selick-néma...

(Synema est une variété d'araignée qui n'a en commun avec notre sujet que le nom... et aussi le fait que le Septième Art est une immense toile, peuplée de nœuds dramatiques et d'émotions qui révèlent parfois les larmes... ces étranges rosées du matin. Ce n'est pas le Web qui contredira tout cela !)


Fantômes de Marionnettes...

« …Et ainsi, la jeune création, à peine née, fut saisie d’une jalousie assoiffée envers son créateur. Cette marionnette fraîchement achevée, entreprit de prendre la place du marionnettiste, en l’achevant à son tour… »


C’est par cette phrase qu’aurait pu commencer le troisième film d’Henry Selick, Monkeybone, sorti en 2001 !

Les séquences en prise de vues réelles abondant de plus en plus au fil de son cinéma, ce nouveau métrage ne contient plus que très peu de stop-motion – même si la configuration peut rappeler Qui a tué Roger Rabbit ? (Robert Zemeckis, 1988), à la différence près que personnages réels et personnages "animés" ne cohabitent pas dans le même univers.


Un singe au bout d'une toile...

Monkeybone narre les péripéties d'un dessinateur se retrouvant plongé dans un entre-deux-mondes aussi forain que cauchemardesque, dans lequel vivent ses propres personnages... Et, en particulier, son alter-ego, son "alter-héros", l’autre côté de son reflet, l’autre côté de son autoportrait, sa némésis-crayonnée : un singe horriblement facétieux !


Même si le candidat de gauche est originellement issu d'un livre beaucoup plus cru et violent que ce que l'adaptation prétend, je pense que son adversaire a quand même de quoi lui donner du fil d'araignée à retordre... Vos paris ? Personnellement, je soutiendrais le premier des deux : c'est un lapin, il est blanc et relativement bien habillé... Il arrivera certainement en avance par rapport à l'autre !

La rencontre ne sera pas des plus reposantes... Surtout si on considère l'ambition de cette créature qui est de prendre la place de son porte-pinceau de créateur, dans le monde hors-papier...

Ce qui ne va pas servir la réputation du pauvre "marionnettiste déchu", noyé dans ses ficelles !

D’autres films traitent aussi de thèmes similaires, tel Elle s’appelle Ruby (Jonathan Dayton et Valerie Faris, 2012) où l’auteur d’un roman va vivre une histoire d’amour aussi "littérale" que "littéraire" avec son héroïne.

Mais on s’éloigne… Revenons plutôt à notre "Qui a tué Roger Ruby" Selickien !

Une petite course n'a jamais tué personne ! Surtout pas quelqu'un qui l'est déjà !

« Rattrapez ce cadavre ! Ses organes nous appartiennent ! » Comment une armada de médecins légistes s’est-elle retrouvée à courser un corps putréfié et ambulant à travers la ville d'une articulation bancale ? Pourquoi un gymnaste en morceaux traîne-t-il son cou qui pend en arrière et sème-t-il derrière lui quelques organes devenus inutiles, en macabre Petit Poucet ? Et pourquoi se précipite-t-il vers un musée où Stu Miley (Brendan Fraser), un célèbre dessinateur de bandes dessinées, participe à un vernissage ?


"Les Noces Funèbres" selon Henry Selick !

Comment en est-on arrivé à ce que ce Stu Miley sautille de tables en tables et de cris en cris, et se déshabille langoureusement devant une assemblée amusée, tout en déshabillant du regard les membres féminins de ladite assemblée ?

Qui est donc cette doctoresse Julie McElroy (Bridget Fonda), qui observe son fiancé se comporter ainsi bizarrement ? Enfin, pourquoi se sent-elle responsable de ce qui arrive ? Est-ce parce que, pour le sortir d’un profond coma, elle lui a injecté une dose trop massive de "gaz de cauchemars", censé le réveiller en sursaut ? Et quel est ce fameux gaz que lorgne Hypnos, au travers des yeux de Monkeybone, lui même à travers les yeux de Stu ?


Globe Oniriculaire...

Evidemment, pour amener le plus logiquement possible une telle scène, il en faut beaucoup d’autres qui la précèdent ! Notamment pour expliquer qu'en cet instant Stu Miley n’est pas Stu Miley, mais un de ses propres personnages : Monkeybone, un singe anthropomorphe qui a pris possession de son corps, profitant que la place soit vacante, l'esprit du propriétaire étant prisonnier d'un coma peu commun.


Le Fantôme du Rêve...

C’est ainsi que les créatures remercient leurs inventeurs ! Dans un des cachots de la Cité des Cauchemars (Downtown) où sa conscience se trouve alors en exil, le véritable Stu Miley fera même la connaissance d’autres créateurs détrônés par leur propre "postérité", dont Stephen King (joué par Jon Bruno), chassé par son Chien, ou Edgar Allan Poe (interprété par Edgar Allan Poe IV), dans l’ombre de son Corbeau… Le temps de ce caméo, il rencontre aussi Jack l’Eventreur, Attila et autres "célébrités des horreurs"...


Chute dans un bien étrange Terrier !
Vers les Griffes d'Hypnos...

Au bord d’une voie ferrée flottant dans le néant, ce drôle de Purgatoire est une immense fête foraine qui abrite, sous son architecture épineuse et bancale, toute une faune de lampions et de monstres, dirigée par le fourbe Hypnos (Giancarlo Esposito), un satyre aussi écarlate que divin.


"Si tu t'endors, tu perds !"... Bref : "pique un somme et on te pique ta pomme, pique du nez et tu restes au piquet !"

Hypnos est un esthète d’un nouveau genre : c’est le mécène des mauvais rêves, qui abreuve de visions tourmentées la population des pré-morts qui passent par son royaume… et surtout par son "Cinéma des Horreurs".


Dans la mythologie grecque, Morphée est le fils d'Hypnos... Ils ont pensé à tout, dites donc !
Dans la mythologie grecque, Morphée est le fils d'Hypnos... Ils ont pensé à tout, dites donc !

Un de ses "fournisseurs préférés" est Stu Miley, le vrai. Son art dérangé, son monde bouleversé, ses idées déboussolées, c’est ce qui plaît à ce Dieu du Sommeil cauchemardomane. Quand il apprend que la fiancée de ce dernier a su fabriquer un composant chimique capable "d’exciter les cauchemars", il échafaude une stratégie pour que Monkeybone prenne la place de Stu dans le "monde d’En Haut", ainsi que possession de ce gaz miraculeux.


Tiens donc ? Une chute ? Une femme qui chute en continu ? Dans un couloir vertical, en plus ? Comme c'est curieux... De plus en plus curieux...

Il ne reste qu’à convaincre le dessinateur de voler un Bon de Sortie à la Mort (jouée par Whoopi Goldberg, également connue pour avoir incarné le Chat de Cheshire dans une adaptation du Pays des Merveilles en 1999), lui donnant accès à l’attraction de la mailloche qui l’enverra tout droit dans la bouche céleste et lointaine du "Libérateur", un immense buste d’Abraham Lincoln d’où sort l’aveuglante lumière du Monde des Vivants.

La figure d'Abraham Lincoln parsème l'oeuvre de Mark Ryden, tout comme des allusions aux Illuminatis et autres mythes du même genre.

Henry Selick le confirme : le visuel de son film est empli de références à l’artiste surréaliste Mark Ryden. Cependant, "The Church of the SubGenius" ("L’Eglise du Sous-Génie"), une religion parodique de la fin du XXème siècle, a aussi droit à son lot d’allusions : que ce soit la présence de nombreux yétis (figure récurrente de cette secte) ou celle du fast-food fictionnel "Burger God", initialement une de leurs trouvailles, ou encore la séquence de rêve où Hypnos joue au golf avec la tête de Stu, enfoncé dans le sable, également un des visuels préférés de cette religion... !


Ici, l’Art est ouvertement le grenier aux traumatismes, la cave refoulée, le débarras où l’on range ses démons intérieurs. Monkeybone a tous les défauts qui irritent Stu : il est bruyant, provocateur, irrespectueux, égoïste, vaniteux, mal élevé… et on en passe… Alors que Stu est un discret poète, un humble romantique aux douces manières et dont la générosité et la bonté d’âme ne peuvent que séduire « Doc », sa charmante fiancée.


Et... où est le porteur ?

Néanmoins, comme le montre la Mort, vers la fin, le singe fait partie de l’homme : l’hôte et l’auteur ne font qu’un ! Voilà de quoi plaire à Selick ! Il y a un dédoublement : deux Stu Miley en un qui se disputent ! D’ailleurs, bien que le dessinateur soit droitier, Monkeybone a été créé de la main gauche !

Si l’œuvre doit, pour exister, se contenter de pages ou de dessins (animés ou non), elle a pour elle de quoi prendre sa revanche : l’immortalité ! Une immortalité figée dans son écran, son "ultime écrin", mais qui enterrera son auteur.

Henry Selick, à gauche, et Brendan Fraser, dans le côté restant, par déduction inspirée !

L’unique moyen pour elle d’être définitivement achevée, n’est-ce pas de tuer son créateur, dans la lignée d’un Complexe d’Œdipe déformé ? Comme si son créateur était le seul geôlier encore capable de la tenir prisonnière ? Quand le maître meurt, l’esclave cesse d’en être un…


Peut-être le film Monkeybone ne va-t-il pas jusque là, mais il en prend le chemin : c’est littéralement le singe qui assassine Stu au début du film, et le tourmente tout au long !


Cette œuvre reste la moins connue de Selick (comme quoi, elles ne survivent pas toutes autant à leur auteur). Son accueil critique comme commercial a imité le protagoniste : il est resté dans le coma.

Un pantin bien gonflé !

On peut croire que c’est à cause de l’apparent changement radical dans le style d’Henry Selick : très peu de stop-motion, comédie complètement déjantée et pas forcément adaptée à un public trop jeune, au vu des nombreuses allusions peu catholiques ! Pourtant, son univers est bel et bien toujours là : des monstres (dont certains semblent flotter sur une vague cubiste), un mal-être, un combat entremêlé à une fuite, beaucoup de nuits et, surtout, une multitude d’insectes, d’araignées et autres invertébrés, fourmillant au pays des cauchemars expérimentaux…


Devinez de qui il s'agit : a) Stu Miley... 2) Monkeybone... III) Brendan Fraser... D) Un personnage... Cinq) Un acteur... (attention : plusieurs réponses sont possibles) ?


En parlant de contrées aux cauchemars, d’araignées et de miroirs, voici que se dégage, à travers la somnolente buée givrée sur la glace, un reflet bien atypique de l’illustre conte Les Aventures d’Alice au Pays des Merveilles, spécialement renommé pour l’occasion : Coraline.


Des fenêtres dans des fenêtres... Ca, c'est de la belle mise en abyme ! Avec vue sur la Caméra !

Lorsque sa fille Holly avait quatre ou cinq ans, Neil Gaiman avait l’habitude de lui lire de belles histoires avant d’aller dormir. Régulièrement, celle-ci lui en demandait une avec des critères bien particuliers : l’héroïne devait être une fillette, également prénommée Holly, dont la mère était enlevée par de méchantes sorcières qui lui ressemblaient comme deux gouttes d'eau. Ne trouvant pas de récits idéalement adaptés aux souhaits de sa fille, le célèbre auteur fantastique décida d’écrire lui-même ce conte absent des bibliothèques !

Le Cinéma, c'est de la Lumière, mais c'est aussi de l'Ombre !

Il en rédigea quelques chapitres avant de devoir s’interrompre afin de se consacrer entièrement à son sacerdoce d’écrivain.

Ce n’est que plus tard qu’il se replongea dans ce curieux voyage après la signature d’un contrat. Cinq ou six lignes par jour plus tard, et nous revoilà en 2000 où l’œuvre est achevée. Elle sortira en 2002.


Une fois son manuscrit enfin terminé, et avant sa parution, il décida de le montrer à Henry Selick dont il admirait le travail ! Tel Burton lisant en avant-première le scénario de Big Fish, Selick découvrit avant tout le monde (excepté la fille de Gaiman) l’extraordinaire périple de Coraline franchissant une porte habituellement condamnée par un mur de brique, qui lui a, un soir, dévoilé un étrange chemin vers un monde aussi identique au sien que différent.


Henry Selick s'est-il inspiré du film "Nothing" ? Pour le savoir (ou pas), rendez-vous dans l'émission "Les FasCinéphiles 2", qui n'est pas en vente dans votre magasin de journaux, mais gratuit sur le site d'Objectif Grand Angle ! On fait sa publicité comme on peut...

Gaiman s’est inspiré de sa propre enfance passée dans un manoir qui avait justement une telle "architecture". Bien que, dans le livre, la porte soit aussi grande que n’importe quelle autre, Selick a choisi de la rétrécir, rendant plus évidente encore la source d’inspiration : Alice et son Pays des Merveilles.


Là, cette fois, l'esthétique me fait plutôt penser au film "Passé Virtuel" ("The Thirteenth Floor", en version originale) de Josef Rusnak, sorti en 1999 en tant que seconde adaptation du roman "Simulacron 3" de Daniel F. Galouye. Je vous le conseille : il est vertigineux !

Et ce n’est pas le seul changement par rapport à l’œuvre de Gaiman. Notre réalisateur confiera lui-même que l’écrivain lui avait laissé une totale main-mise sur l’adaptation ! C'est bien heureux, le roman étant (comme sa "muse Wonderlandienne") difficilement adaptable tel quel à l’écran, les pensées de l'héroïne prenant une plutôt grande part du récit.


Pour continuer dans les références, cette image-ci m'évoque curieusement "La Cité des Enfants Perdus" de Jean-Pierre Jeunet... Même si ça n'a absolument rien à voir ! C'était juste un prétexte pour vous recommander ce film, aussi !

Afin d'éviter de trop fastidieux soliloques peu cinématographiques, Selick décida de créer un nouveau personnage, un garçon du même âge que Coraline qui lui donnerait la réplique, tel un ami auquel elle pourrait se confier (de son nom anglophone : Wyborne « Wybie » Lovat, ou alors Padbol « Padbie » Lovat du côté francophone).

Cela permettait également d’apporter plus facilement et plus "rapidement" certaines informations… Résumer un long roman en une heure quarante n’est pas des plus "naturels", ce personnage est donc un excellent allié pour faire avancer l’intrigue, tout en l’éclaircissant parfois. Sa présence permet même de développer une autre facette de l'héroïne : sa façon d'être avec les enfants de son âge. Ce qui la rend plus vraie, plus vivante.


Sans compter que cet invité inédit reste dans le thème de l'enfance mais aussi dans celui de la "dualité" : à la fois il est pour Coraline un référent de confiance, du même "monde générationnel", mais il est aussi un étranger, un élément de ce nouveau décor qui s'impose à elle, mystère compris. Mystère auquel il semble d'ailleurs lié, de par sa grand-mère propriétaire des lieux et le fait qu'il paraisse lointainement au courant de certains secrets.


Vous pourrez voir un panneau de générique semblable à celui-ci dans les films "L'Etrange Pouvoir de Norman" ("ParaNorman" de Sam Fell et Chris Butler, 2012), "The Boxtrolls" (éponyme, de Graham Annable et Anthony Stacchi, 2014) et "Kubo et l'armure Magique" ("Kubo and the Two Strings" de Travis Knight, 2016). Avec "Coraline", ils sont, à l'heure actuelle, les seuls habitants officiels des archives de ces studios.

Ce seront aux studios Laika de soutenir l'ambitieux projet, autant financièrement que matériellement ou humainement. Une équipe de soixante-dix collaborateurs a été nécessaire pour la fabrication et la conception des personnages. Une seule figurine de Coraline mobilisait déjà dix personnes durant trois à quatre mois. Vingt-huit figurines d'une vingtaine de centimètres ont été créées pour elle seule, avec neuf costumes différents reproduits à une demi-douzaine d'exemplaires.

Ces créatures, il faut aussi leur donner une voix : Teri Hatcher en sait quelque chose ! D'abord doubleuse de Mel Jones, la mère de Coraline, elle est devenue celle de l'Autre Mère, qui elle-même doit avoir deux timbres de voix (quand elle est attentionnée et quand elle révèle ses ténèbres). Ce qui fait trois voix différentes à jouer ! Le tout bercé par les symphoniques incantations de Bruno Coulais !


Mais tous ces efforts connaîtront une belle récompense ! Lorsque le film sortira en 2009, le succès l'accueillera pour le mener au Festival du Film d'Animation d'Annecy où il recevra le Cristal du Long-Métrage. De plus, pour fêter cette naissance, les Annie Awards 2010 lui offriront le statut d'oeuvre aux meilleurs décors, à la meilleure conception des personnages et à la meilleure musique, en cadeau de bienvenue dans la Vie !


Le Miroir des Choix !

On peut, bien sûr, s’amuser à trouver des parallélismes avec le Pays des Merveilles, même si on risque assez vite d’extrapoler.


Par exemple, les scènes des deux divas que Coraline rencontre, pourraient être une lointaine version du fameux chapitre d’Alice Un Thé chez les Fous : elles prétendent lire l’avenir dans les tasses de thé et leur conversation a une logique bien singulière, digne de l'absurde du conte.

Celle prénommée Avril ne ferait-elle pas un bel hommage au Lièvre de Mars ?

Et les chiens que l’on retrouve partout chez elles, jusque dans la vaisselle, peut-être sont-ils des "reflets" du Loir dormant dans les théières...


Quelques-unes des références les plus évidentes restent les souris-acrobates blanches qui mènent CorAlice vers la porte du terrier, ainsi que le fameux chat qui parle, jouant les anges gardiens.

On ne pouvait y couper (et notre tête non plus) : il y a aussi un personnage qui se "la joue" Reine de Cœur, animé d’un amour incontestablement un peu trop affamé. Ici, nous l’appellerons « l’Autre Mère » !


Sur le Trône de Coeur !

Ce monde-reflet a tout pour séduire Coraline : il est coloré quand le sien est gris, et les "autres-parents" qu’elle y trouve semblent l’aimer plus que les siens véritables.


La Verticalité est une question de point de vue ! Si vous êtes d'accord, penchez la tête sur le côté pour acquiescer.

Henry Selick s’amuse encore à ficeler son personnage entre deux toiles, deux mondes si proches et pourtant bien différents ! Ce n’est pas Halloween qui s’égare dans Noël, ni les vivants qui se prennent les pieds dans leurs cauchemars, mais c’est carrément la Vérité qui fusionne avec le Mensonge.

À tel point qu’on ne peut presque plus les différencier ! Coraline mélange ses vies, d'abord de façon méthodique : la réelle pendant le jour et la "rêvée" pour la nuit... jusqu'à ce que cette dernière (qui prenait de plus en plus de place, temporellement comme spatialement) rompe cet "équilibre", que le schéma s'emballe, que la frontière se fasse moins évidente et que la nuit ne vienne empiéter sur le jour...


Doit-on considérer qu'elle a une acné assez envahissante ? Si c'est le cas, ça a contaminé l'herbe et son imperméable aussi ! Ca a une santé fragile, ces éléments-là... Ils ne supportent pas la moindre petite présence maladive ! J'aurais tendance à croire qu'ils sont bien douillets !

Seuls deux juges, ou plutôt deux témoins, permettent encore de distinguer l’hallucination de la lumière : les yeux ! Dans le Monde-Bis, tous les yeux ont été remplacés par des boutons de poupée, confirmant qu'on a bien affaire à des pantins pendus aux doigts de la sorcière.


Tous ces personnages se rendent-ils eux-mêmes compte qu’ils ne sont que figurines, contrôlés par des mains venues d'encore Au-Dessus, d'un beaucoup plus vaste univers, "supérieur" ?


La notion de dédoublement va dans les deux sens : eux qui sont des poupées pour nous, ont eux-mêmes leurs poupées à eux, notamment celle dont se sert l’Autre Mère pour attirer Coraline, à l’effigie de sa jeune proie.


Et l’araignée ? Où sont-ils, ici, les invertébrés des cauchemars ? Partout ! Le Monde-Bis, spécialement créé pour y piéger Coraline, est comme un coin de grenier hanté par la poussière suffocante, et habité par toute une faune de fantômes rampants, accrochés aux mains d’aiguilles de l’Autre Mère, parmi quelques cadavres de boutons cassés.


Eclipse Boutonneuse...
Poussière de Toile...
 
Qu'est-ce qui pourrait confirmer qu'il s'agit, ici, bel et bien de l'Autre Mère ?
L'Autre Ombre... D'ailleurs, si on considère que c'est le deuxième (et véritable) visage de l'Autre Mère, ne devrait-on pas l'appeler "l'Autre-Autre-Mère" ?

Deux toiles, deux prisons : celle de Stu Miley et celle de Coraline… et deux prisons bien spéciales : elles se servent des rêves comme chaînes et toutes deux ont été "imaginées" par leur prisonnier respectif

Stu a modelé ses démons, comme pour en débarrasser ses mains. Coraline, elle, a espéré et attendu sa propre geôle, sans en avoir conscience.


Ces deux film parlent donc, chacun à leur manière, de création et de créatures qui restent enfermées dans une prison plus vaste que celles qu’elles fuient : l’écran du Cinéma.


Toiles en Miroir...

Mais un jour, sans doute, s’en rendront-elles compte et chercheront-elles leur liberté chez nous. Ce sera à Henry Selick de veiller à ne pas se faire enlever et remplacer par l’une d’entre elles… Si ce n’est pas déjà le cas : est-ce Selick qui a fait ses personnages ou bien ces personnages qui ont fait Selick ?


Souvenirs d'Henry Selick et retrouvailles de cousines !

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